romálon #11 // golden

✩ ✩ ✩ ✩ ✩i've seen the stars in a thousand lights, they don't compare to how you look tonight. i've seen the planets from up above, i don't know how, but you surpass them all

Une fois de plus, ils ont pris leur temps, Ava et lui, et fait les choses dans un ordre peu conventionnel, pour ne pas dire aléatoire. S'il compte bien (et il en est certain, pour une fois), ils sont ensemble depuis presque trois mois, mais voilà seulement que s'organise leur premier date. Ou plutôt, premier vrai date, dressed up et restaurant à la carte composée d'autre chose que de plats à emporter. Il ne sait pas s'il voit ça comme une étape particulière, Rome, mais c'est toujours plaisant — pas qu'il puisse en être autrement auprès d'Avalon. A vrai dire, il aime qu'il en soit ainsi, entre eux, rien de typique, rien d'attendu, évoluer au rythme des envies plutôt que parce qu'ils sauraient ce que l'on doit attendre d'une relation à ce stade, ou à leurs âges. Ce n'est pas comme s'ils avaient jamais fait les choses dans l'ordre, entre leur première Saint Valentin (qui constitue peut-être bien une date de premier rendez-vous, bien qu'ils n'aient pas été ensemble avant l'année suivante) et le premier baiser dans la peau d'autres, personnages qui leur ressemblent pourtant tant maintenant.
Mais, s'il aime la façon qu'ils ont de ne pas trop planifier, Román, il n'est pas fan du sentiment qui grimpe à mesure qu'il réalise le retard pris par Avalon. Il n'avait pas vraiment relevé le fait qu'elle n'ait pas répondu à son dernier message, elle devait terminer de se préparer, ou être en chemin, mais lorsqu'un serveur lui demande s'il attend toujours quelqu'un, l'estomac semble oublier la faim pour un autre sentiment et il ouvre à nouveau leur conversation. Elle n'est pas en retard, Ava, à moins d'un gros imprévu, et elle prévient si c'est le cas. Et elle ne lui poserait pas un lapin, pas maintenant, il ne s'inquiète pas pour ça. Le second message sans réponse le nargue quelques longues minutes, et il finit par choisir de la rejoindre là où il s'imagine pouvoir la trouver, puisque le téléphone l'envoie directement sur la messagerie. Le trajet lui semble un peu long, plus long que d'habitude, même s'il s'efforce de contrôler l'inquiétude qui n'a pour l'heure pas de réelle raison de battre dans sa cage thoracique.
Légers coups contre la porte, rien, pas de bruit de l'autre côté, du moins rien qu'il ne perçoive, et il se permet donc d'entrer, clés échangées par facilité sans se soucier que ce puisse être tôt, différent, inhabituel. Et elle est là, Ava, les traits à moitié cachés par des mèches tombées devant ses yeux alors qu'elle respire paisiblement, rythme ensommeillé, le corps recroquevillé sur le canapé et entouré de ce qui semble être différents choix de tenue pour la soirée. Il sourit, Román, envisage de lui laisser un mot et de la laisser récupérer tranquillement, mais pressent qu'elle se sentira coupable et déçue de l'annulation de la soirée alors il dépose ses affaires, la rejoint. Accroupi à son niveau, il dégage les cheveux occultant son visage et la voit commencer à reprendre conscience. « Ava ? », il chuchote, c'est largement suffisant dans le silence de l'appartement. Le réveil se fait, un peu moins doux que prévu, et il calme un rire. « Sorry, babe, didn't mean to scare you. I let myself in, you were out cold. » Se redressant légèrement pour avoir accès à son visage, il dépose ses lèvres contre son front. « Hi. »

Elle est rentrée en prenant son temps — largement en avance pour le rendez-vous (le date, qu’elle se corrige, même si ça ne fait pas de différence, en réalité). La journée allégée pour pouvoir se préparer comme il se doit pour ce premier rencard hors de l’appartement de l’un comme de l’autre, une vraie sortie en tant que couple, pouvoir flâner devant son placard et se demander quoi porter, quelle couleur de fard à paupière, quelles chaussures porter — et aussi un peu parce qu’elle a cumulé les grosses journées, dernièrement, que la fatigue lui tombe dessus malgré des nuits pleines, et qu’elle compte donc se rendre au restaurant à pied. Elle se dirige derechef vers la chambre, ouvre les portes en grand, commence à entasser les ensemble sur son lit avant de lui jeter un regard, de s’y asseoir en tailleur pour faire un second tri mais l’envie de s’allonger est présente, trop présente et elle préfère tout embarque dans ses bras et emmener dans le salon, moins risqué d’être tentée de s’endormir. Il y a quelques allers-retours effectués, le temps qu’elle se décide, des vêtements mis de côté, d’autres rangés avant d’être sortis une nouvelle fois parce qu’on ne sait jamais (et quel sac va-t-elle prendre ?). Elle jette de fréquents regards en direction de sa montre, Ava, ou de son téléphone, pour répondre aux messages de Rom, un sourire venant fleurir ses lèvres à mesure qu’elle sent l’heure approcher. De retour dans le salon, elle s’installe au milieu des robes, des cintres et des jupes, grimace devant certaines couleurs qui, elle le sait, ne lui vont pas, hésite entre une robe dos-nu noire, une plus simple violette ou bien une autre encore, qui fait peut-être moins habillée mais c’est juste un date avec son petit-ami, ce n’est pas comme si c’était la première fois qu’ils se voyaient (pas comme s’il n’avait pas déjà eu un aperçu de sa tête au réveil, non plus, sans maquillage, sans rien). Elle se passe une main dans les cheveux, se frotte les yeux, étouffe un bâillement. Elle a encore le temps. Largement, même. Alors elle plaque son dos contre le dossier, rejette la tête en arrière, ferme les yeux. Juste deux minutes. Et après, elle ira se laver et finira de choisir sa tenue.
Elle sent quelque chose qui lui frôle le front et elle reprend conscience de ce qui l’entoure. Sa position étrange, son dos tordu dans un angle douloureux, quelque chose de fin enfoncé sur sa joue et d’une voix qui semble l’appeler avec douceur. Elle ouvre les yeux brutalement, léger sursaut, et elle reconnaît la silhouette de Román immédiatement, le sourire retrouve ses lèvres de le savoir là, de sentir ses lèvres sur son front et elle tend une main dans sa direction, touche son col. « Hey, » qu’elle articule, la voix un peu pâteuse avant qu’elle ne se redresse, lentement, ne termine de prendre conscience des vêtements éparpillées, certains tombés sur le sol et elle pose les yeux sur Rom, si bien habillé et tout lui revient et elle sent le rouge qui lui monte aux joues, et elle se lève d’un coup, s’éloigne, la poitrine douloureuse. « Oh my god, don’t tell me I did that. » Une main à son estomac et elle le regarde, si honteuse pour lui, néanmoins consciente qu’il sera rapide à diffuser cette sensation d’un geste de la main (no big deal qu’il lui dira probablement et elle sait qu’il le pensera mais pour elle, c’en est un et elle s’en veut). « I’m so sorry, Rom, I - I didn’t think I’d fell asleep. » Elle s’approche de lui, les mains qui trouvent ses côtes lentement tandis que son front va se reposer contre lui. « I’m the worst girlfriend ever, I really am sorry. Guess it’s too late to go to the restaurant, uh? I’ll make it up to you I promise, I’ll pay. » Et elle s’écarte légèrement, les mains toujours scotchées à lui, les dents qui se sont plantées dans sa lèvre inférieure.

Le restaurant ne lui tenait pas plus à coeur qu'un autre plan, vraiment. Il se moque bien, Román, d'où ils sont, de ce qu'ils font. Seul lui importe qu'Avalon soit là, et il pourrait même la laisser dormir, simplement s'installer dans l'appartement et attendre qu'elle soit suffisamment reposée — la connaissant, elle a probablement un ou deux dossiers qui traînent qu'il pourrait feuilleter pour s'occuper. Et puis, vu l'heure, c'est mort pour le restaurant, autant manger ici. Il est également tenté de repartir, satisfait de savoir qu'elle va bien, mais quelque chose lui dit que l'idée ne semblera pas aussi bonne à Ava. La réveiller, alors, bien qu'un peu à contrecœur. Il sait les journées longues, ces derniers temps, il en va de même pour les siennes, des choses à boucler, l'impression assez correcte de courir dans tous les sens. Ils ne comptent pas vraiment leurs heures, non plus, un problème qui ne se posait pas lorsqu'il travaillait seul mais, avec Ava, il a le sentiment qu'ils nourrissent et encouragent ce trait l'un chez l'autre, ce qui risque fort de devenir un problème. Il s'en rend encore plus compte en la voyant comme ça, assoupie au milieu de ses préparatifs, comme si elle avait été soudainement assommée par la fatigue accumulée, incapable de la combattre. Et il sait qu'Ava, elle ne se laisse pas si aisément gagner par le sommeil. Il sait aussi que leur soirée lui tenait à coeur, l'intention n'était certainement pas de lui poser un lapin — et, s'il en avait douté, la multitude de tenues préparées pour l'occasion l'aurait détrompé.
Une main fait apparaître ses traits de derrière les mèches blondes, sa voix sonne à peine mais un mouvement lui répond tout de même. Elle s'éveille, le sourire aux lèvres en le reconnaissant, et il ne se lasse jamais de ces premiers moments de conscience lorsqu'ils se réveillent ensemble, d'abord le souvenir de ce qui l'entoure, puis le sourire qui ne manque pas à l'appel quand elle réalise qu'il est toujours là. Ce soir, il y a, additionnellement, la réalisation. Il sourit, secoue la tête face à sa réaction. « Hey, you needed some sleep, it's fine, it doesn't matter. I know you didn't. » Il ne le dit pas uniquement pour qu'elle se sente mieux, loin de là. Déjà, il ne sait pas lui mentir, ce serait peine perdue. Et puis, vraiment, il n'en est pas le moins du monde contrarié. Il ne pourrait pas l'être même s'il essayait. Ses bras sont déjà prêts à l'accueillir lorsqu'elle le rejoint. « Stop that. You're good, A, you're the best, don't beat yourself up. We could have postponed, you know, you didn't have to fight sleep on my behalf. » A nouveau, ses lèvres trouvent son front, il caresse son bras du bout des doigts. « It's enough for me to see you, alright, it's all I need. » Il se penche, ses lèvres trouvent brièvement les siennes, repose son front contre le sien. « We can just stay here, wouldn't want you to fall asleep on the table at the restaurant. » C'est plus fort que lui, cependant, il faut qu'il profite un peu de cette occasion parfaite de se moquer.

Rom, il est la première image qu’elle voit en ouvrant les yeux et elle sait, consciemment, quelque part dans son esprit, qu’elle devrait s’y être habituée, maintenant — près de trois mois qu’il est cette vision matinale, qu’il soit déjà réveillé, en train de s’activer dans la chambre ou encore endormi pour quelques minutes — mais ce n’est pas le cas, c’est toujours la même surprise, cette sorte d’incrédulité à l’idée qu’ils en soient enfin là, à pouvoir partager des instants si intimes, ces moments qu’elle a encore l’impression de voler. Et puis ses yeux descendent légèrement, aperçoivent le col de chemise, la veste, l’effort vestimentaire qui n’est pas sans lui rappeler une autre soirée et elle réalise, prend conscience, s’affole, déjà trop éloignée de lui, déjà si paniquée. Elle n’en revient pas, Ava, d’avoir tant de retard au point qu’il soit venu chez elle, comme pour s’assurer que rien ne s’était produit, comme pour vérifier qu’elle aille bien et elle cherche des yeux son téléphone, sans doute abandonné dans sa chambre lors de ses nombreux allers-retours, et elle lève vers lui un regard désolé, les traits étirés de honte. Et il a les mots qu’elle attendait qu’il ait, ceux qu’elle avait deviné avant même qu’il ne les prononce et si elle sait que c’est vrai pour lui, ça ne l’est pas autant pour elle — et c’est ridicule, elle en a conscience, Ava, mais elle y tenait à cette sortie en amoureux, de pouvoir s’afficher à son bras ou juste partager une table dans un beau restaurant, sans qu’il n’ait besoin de faire quoique ce soit (ou qu’elle n’ait besoin de faire semblant de l’aider tout en le ralentissant plus qu’autre chose), pour qu’il puisse autant en profiter, qu’il puisse, lui aussi, se détendre. « Yeah, but, » qu’elle proteste, « I wanted us to go out in the world as a couple you know and now I feel just ridiculous for sayin’ it out loud but it’s not the same. It was a date, our first date. Well not really but kinda, you know? » Elle se mord la lèvre tout en allant trouver réconfort contre son torse, la tête qui repose contre son plexus — encore quelque chose sur lequel elle travaille que de dire les choses telles qu’elle les ressent plutôt que de garder enfermé, de partager pas seulement le beau mais aussi les déceptions idiotes comme celles de ce soir. « I wasn’t, I swear. I just… I don’t know, I wanted to rest for a sec because I couldn’t really find something to wear anyway and then I - I guess I just fell asleep without even realizing it. » Et c’est la vérité, elle ne s’est pas sentie partir dans un sommeil plus profond, n’a même pas eu l’impression de s’endormir ou pouvoir être sur le point de le faire. « Don’t be all charming and comprehensive and romantic on me, Amor. » Mais c’est un petit sourire qui finit par soulever ses lèvres contre celles de Román, ses bras qui glissent jusque dans son dos. Avant que ses yeux ne roulent dans leurs orbites à sa remarque suivante, déjà plus lui et elle se mord le coin de la lèvre pour masquer son amusement. « Ahah, very funny. And here I was, thinking I’d make it up to you later tonight… » La grimace qui remplace l’amusement précédent tandis qu’elle exagère un soupir sans pourtant rompre l’étreinte. Se hisse même plutôt sur la pointe des pieds pour lui dérober un baiser légèrement plus long. « But thanks for being understanding. » L’envie de préciser qu’elle ne sait pas à quel moment elle a pu devenir so lucky d’être tombée sur lui, de pouvoir profiter de cette relation, cette facette de sa personnalité qu’il ne doit pas souvent dévoiler (non pas que ça la gêne, de le découvrir si tendre et romantique uniquement en sa présence, uniquement dans des instants intimistes comme celui-ci). « Still care to stay the night? We can order in, » qu’elle suggère, déjà prête à remballer les tenues qui continuent de décorer son canapé pour leur faire de la place.

Il ne sait pas au bout de combien de temps on s'y fait, s'il s'y fera vraiment un jour. Ava qui le regarde comme ça, une évidence qu'il n'est vraiment pas, une chance qu'il ne méritait pas. Et sans doute était-ce plus évident pour d'autres, le regard extérieur, c'est en tout cas ce qu'il a conclu des multiples incursions de sa soeur (et de cette chère Mémé). Sans doute qu'il devrait se laisser y croire, aussi, plutôt que de s'étonner à chaque fois que ce regard-là croise le sien, que ce sourire-là étire ses lèvres à sa vue. Et en même temps, il n'est pas certain de vouloir perdre cette impression, le coeur qui s'affole un peu, systématiquement, la surprise positive, toujours positive. Comment pourrait-il s'en lasser ? Ce n'est pas comme s'il doutait vraiment, à un quelconque moment, de ce qu'ils ont. Il ne serait pas là, sinon, ses clés en main et la conscience qu'elle n'a pas fait exprès de ne pas se présenter au rendez-vous. Il sait aussi que ses mots ne représentent aucune sorte d'étonnement, elle le connait trop bien que pour s'être attendue à ce qu'il lui en veuille — et elle fait très bien cela toute seule. Tout comme lui s'attendait à ce qu'elle réplique, pas convaincue, ou en tout cas pas exactement sur la même longueur d'onde. Pas que Román se fiche de leur premier vrai rendez-vous, loin de là. « I know. You're not ridiculous, you're right, it was a great occasion and I was happy to do that too, but it's only a rain check, right ? You're not getting rid of me. » Peut-être est-ce parce que c'est elle, peut-être qu'il l'aurait un peu moins bien pris dans d'autres circonstances, mais, comme il s'y attendait, elle est déjà bien assez déçue, et, lui, pour une fois, il trouve en quelques sortes les bons côtés. « I still think we work too much, you know ? It's like... the only thing we're bad at, I never stop and neither do you. I feel like we'll eventually burn out, as much as we like it now. » Et peut-être a-t-il aussi un peu peur qu'ils se voient trop, tous les jours, tout le temps, au travail et puis ici, ou chez lui. Pas maintenant, peut-être même pas bientôt, mais il y a cette impression persistante que quelque chose cloche dans leur système actuel. Sa main parcoure distraitement le dos d'Ava. « Can't help it », sourit-il, moqueur dans un premier temps, mais attendri par le surnom et le sourire s'élargit un peu. « I mean, I was all alone in that restaurant, worried and all... », exagère-t-il, incapable pourtant de ne pas sourire à nouveau, se mordant l'intérieur de la joue en vain. « Happens to the best of us », qu'il conclut simplement, quoi qu'il n'est pas certain que cette situation exacte se produise souvent, mais, les imprévus, bien. Il ne s'agit finalement que de ça et, comme toujours, la solution n'est pas très loin, ils auront de nouveau une réservation d'ici peu. Quant à ce soir, rester là lui convient très bien. « Of course », acquiesce-t-il, et il finit par ôter sa veste, retrousse légèrement les manches de sa chemise. « I was thinking I could cook, actually, if you've got anything. Unless you're very sick of my cooking, which would be, you know, a crime and a hard blow, but I'd understand eventually. »

Elle n'a pas souvenir d'avoir un jour ressenti les prémices d'une relation aussi longtemps, Ava. Ces émotions qui viennent papillonner dans son ventre dès qu'elle voit le nom de l'autre, le sourire qui s'étire par automatisme et l'envie de conserver le contact physique le plus possible quand bien même n'est-elle pas du tout tactile d'ordinaire. Elle est quasiment certaine de toujours se lasser au bout de quelques semaines seulement, de vite chercher à retrouver une forme d'indépendance, de ne pas réussir à faire taire cette voix au fond d'elle qui lui intime que non, she's strong, elle n'a pas besoin de voir son homme constamment pour aller bien ou l'aimer - mais avec Rom, le sentiment perdure, ces frissons et bonheur et mini explosions de joie continuent de s'emparer d'elle comme ce soir et elle ne peut pas, Avalon, s'empêcher de craindre le moment où ce ne sera plus le cas. De craindre que tout s'achève trop vite, trop soudainement et par sa faute (parce que ça ne pourra pas être celle de Rom, n'est-ce pas ? Pas quand il la regarde avec ces yeux-là, quand il est présent, inquiet de l'avoir trouvé endormie et pourtant un peu amusé de sa fatigue). Et elle sait qu'elle n'a pas fait exprès de lui poser un lapin, elle sait qu'il sera loin de lui en vouloir mais elle ne peut pas s'empêcher de s'insulter mentalement, de se reprocher d'avoir fait une elle, de ne pas avoir été à la hauteur comme trop souvent peut-être et les mots de Rom, ils ne peuvent que la rassurer, au moins un peu. Elle se serre un peu plus contre son torse, la naissance d'un sourire apparaissant finalement sur le bord de ses lèvres. « Well, I can only hope you're not running away after tonight. But alright, » qu'elle consent finalement avec sa petite moue qui s'efface bien vite quand il reprend. Elle partage cette crainte-là également, celle de trop travailler, celle de ne pas savoir freiner, de s'épuiser inutilement jusqu'à ce que ça créé des tensions entre eux (elle ne sait pas pourquoi, en revanche, elle ne peut pas empêcher son cerveau de courir aux scénario catastrophes malgré elle). « Yeah I know. Maybe we should take a break? I can take a couple of days and then you and then, maybe, we can take some together? » Elle tordrait presque la bouche, Avalon, de sa proposition qui la rend presque timide - car peut-être n'envisageait-il pas qu'ils puissent prendre des vacances ensemble, peut-être même n'est-ce pas réalisable car qui tiendrait le bureau, qui répondrait aux mails de clients dans ce cas ? Et il reprend, taquin (elle l'entend à sa voix, le voit à son sourire et elle sent son coeur qui chavire un peu davantage, fait de son mieux pour masquer son sourire en coin). « Really? Ever fell asleep while getting ready to go on a date? » Elle serait bien surprise de l'entendre répondre par l'affirmative - mais ne demande qu'à être surprise. Ses yeux clairs s'attendrissent avant qu'elle ne les lève au ciel. « First of all you do realise we're at my place right? I probably have like some pasta and maybe some vegetables but that might be all so if you think you can do wonder with so little please, be my guest. » Elle sait qu'il en serait capable, pourra sans doute répondre au challenge avec la même ferveur qu'elle l'aurait fait (s'il ne s'agissait pas de cuisine). « Need some help with like, I don't know, cutting stuff? » Ses doigts courent le long de son bras avant qu'elle ne se souvienne de ses robes pré-sélectionnées. « Lemme clean this first. »

Sa tête se secoue mécaniquement à la remarque d'Avalon, Román, il n'est pas près de partir, il pense que c'est même plutôt évident. La seule façon dont il peut s'imaginer fuir serait si elle le lui demandait, et il ne se laisse pas l'imaginer longtemps. « I mean, I ran straight here, I think it gives a slight idea of how I feel. » He's whipped, et ce depuis un certain temps s'il se montre honnête avec lui-même. Pas qu'il soit particulièrement capable de l'exprimer oralement, c'est ce qui lui fait généralement défaut, mais il le montre suffisamment, du moins c'est ce qu'il espère. Il l'exprime aussi dans sa façon de s'en faire pour eux en tant qu'équipe, collègues, pas au profit de son business mais parce qu'il existe ces deux facettes de leur relation qui lui paraissent parfois destinées à s'entre-détruire. Qu'ils ne se verraient plus en dehors du bureau, épuisés par leurs affaires. Qu'ils ne se parleraient plus de rien d'autre que du travail. Qu'ils finissent par n'avoir plus que cela en commun, que le reste s'effiloche lentement, sans même qu'ils ne s'en rendent compte avant qu'il ne soit trop tard. Il sait qu'il a toujours été comme ça, Román, plus préoccupé par son métier et ayant toujours les bonnes excuses pour le justifier (il commençait à peine, il n'avait pas le choix s'il voulait que ça fonctionne, ça commençait à décoller, il ne pouvait pas se permettre de ralentir, il fallait se faire un nom), et, même s'il fait récemment bien plus attention à trouver une balance, ce n'est pas encore assez, surtout pas quand Avalon est exactement comme lui. Il se rassure cependant du fait qu'elle partage son opinion, à deux, ils peuvent tout à fait endiguer le problème. « I'd like that », confirme-t-il rapidement, sentant une pointe d'hésitation chez la blonde. « It's gonna require a bit of organisation but I'm sure Chicago can survive without our work for a bit. » Rom, il ne prend pas des vacances pour n'importe qui, mais la question ne semble pas véritablement se poser ici. Et peut-être est-ce la fatigue qui s'accumule, les années quasi non-stop, mais quelque chose lui dit que ça ne se limite pas à cela. « No, but I fell asleep in the middle of one, though, I think that's worse », contre-t-il, ayant en réalité pas mal d'histoires un peu chaotiques à raconter s'il est question de rendez-vous foireux. « She threw a drink in my face to "wake me up" », se souvient-il en réprimant un léger rire. Il en a entendu parler pendant un certain temps, de ce coup-là, et n'en est pas particulièrement fier non plus mais cela lui fait au moins de quoi rivaliser avec Ava ce soir. « Maybe I should've thought of that to wake you », qu'il remarque, bien que cela lui aurait valu un accueil bien moins chaleureux. « Woah, woah, don't brag now, you've got pasta AND vegetables ? » Il pousse un peu sa chance à force de se moquer d'elle mais c'est plus fort que lui. « As long as you've got spices somewhere, I can do something », reprend-t-il plus sérieusement, et il la laisse s'occuper de ranger les tenues délaissées sur le canapé, se délestant pour sa part de la veste qui entrave légèrement ses mouvements et prenant la direction de la cuisine. Comme promis, rien d'extravagant, mais on peut toujours faire beaucoup avec peu de choses. Il choisit ses légumes et se met déjà au travail, fredonnant un air sur lequel il ne pourrait pas remettre de nom en attendant d'être rejoint. « All good ? You know I can do this on my own if you're tired. »

Contre sa cage thoracique, son coeur s’emballe. Elle le sait, pourtant, how he feels. Elle le sait parce qu’il le lui montre au quotidien, le lui prouve régulièrement et parce qu’elle ressent la même chose tout en éprouvant les mêmes difficultés à le verbaliser. Elle le sait parce qu’il est toujours là après autant de mois ensemble, qu’il l’était même avant qu’ils ne se mettent ensemble et qu’il n’avait même pas fui devant ses lubies et ses manies au boulot — et rien que ça, ça représente déjà un quelque chose de conséquent. Elle hésite pourtant à jouer l’ignarde, à hausser les épaules, ne pas se montrer convaincue. L’hésitation ne dure pas longtemps. « Well you could have thought I was dead. Or with someone else what do I know, I’m not in your head. Who knows what’s going on in there. » Il vient là, le haussement d’épaule. Il vient seul, pas de sourire en coin pour montrer son bluff (elle peut être redoutable au poker, quand elle s’y met), pas de regard qui cherche à se dérober ailleurs, plus loin, pour ne pas perdre sa crédibilité. Ce n’est pas tant pour qu’il le lui dise (elle s’en fout, préfère encore qu’il ne dise rien mais continue d’agir comme il le fait plutôt qu’il le lui dise à répétition mais l’ignore royalement le reste du temps, les actions ont toujours eu davantage d’impact que les mots, pour elle) que juste pour continuer le jeu. Sa façon à elle de flirter, même maintenant qu’ils sont ensemble et qu’ils n’ont plus rien à se prouver, plus à se séduire pour former un eux auquel elle ne revient toujours pas certains matins. Et puis, elle a toujours un peu cette peur ancrée au fond d’elle, Avalon. Celle qu’il ne se rende compte qu’il pourrait avoir mieux, qu’elle ne suffise pas, qu’elle soit trop et pas assez à la fois, trop insupportable, pas assez souriante ou gentille, ou tout ce que la société voudrait que les femmes soient et qu’elle n’est tout simplement pas (et pas capable de devenir, visiblement, encore moins après vingt-huit ans). Cette peur que cette relation finisse comme toutes ses précédentes bien qu’elle en soit déjà si loin. Le sujet n’est plus à la taquinerie, déjà, ni même à ce qu’elle puisse laisser exprimer son angoisse enfouie et silencieuse parce qu’il a dérivé et la voilà qui propose des vacances, solitaires et communes, les deux, car pourquoi pas. Ne l’ont-ils pas mérité, lui surtout ? Les dents viennent se planter dans sa lèvre inférieure, seul indice qu’elle n’est pas tout à fait certaine de sa proposition, de comment elle sera interpréter, et le soulagement vient rapidement. Elle relève les yeux et son sourire atrophié par l’inférieure qu’elle garde captive de ses incisives s’élargit. « Well, it’s our luck that one of us is very organized and control freak, then. » Pour une fois que sa maniaquerie et son caractère impossible pourront servir. Et même si organiser des vacances n’est pas dans ses habitudes, elle saura improviser, elle n’en doute pas — il lui suffira de prévenir les clients, d’essayer de boucler un maximum de dossier avant de partir, et de mettre des messages à l’attention de potentiels clients et peut-être que quelqu’un pourrait quand même faire la prise de rendez-vous pour quand ils reviendraient, comme un secrétaire embauché sur une période définie. Elle y réfléchit déjà, Avalon, pas qu’elle soit particulièrement pressée de devoir décompresser et déconnecter du travail (pas qu’elle s’en estime capable ou pense Rom capable d’un tel exploit) mais parce qu’elle est lancée sur le sujet et que son cerveau ne peut pas s’en empêcher. « You did what? Wait, you do realize you’ve said too much, right? I have to hear the story! » C’est que ça suffirait presque à lui ôter les dernières traces de sommeil, en réalité — il y a pire qu’elle. Elle refuse d’imaginer que Román est en cause, assume donc plutôt que son date était d’un ennui ultime. Se demande si ça s’est passé au restaurant (compliqué), au cinéma, ailleurs (préfère ne pas trop en imaginer non plus). « Ah ah, very funny. You know what? I’ll fall asleep on your couch next time so you can throw a drink at me to wake me up, does it work for you? » L’air espiègle retrouvé avant qu’il ne disparaisse derrière un regard levé au ciel, des yeux qui roulent deux fois plutôt qu’une. « Keep making fun of me and you’ll have to eat someplace else. » Non pas que ce soit une véritable menace (ailleurs sera sans doute plus nourrissant que chez elle, elle en a au moins conscience). « Spi… Well, you’ll have to find that one out by looking for it. » Elle doit bien avoir quelques trucs rangés quelque part — c’est tout ce qu’elle peut supposer. Elle ne fera aucun autre commentaire, Ava. Et comme il retire sa veste pour se mettre au travail, elle embarque les robes et autre idées de tenues pour les replacer dans son placard. Elle ressort deux minutes pour lui lancer un regard à la dérobée, se décide quand même pour se changer rapidement — au moins donner l’impression que ce date en est un, même s’ils sont à la maison, avant de retourner dans la cuisine. « I’m not entirely useless in a kitchen and I just had a nap, I should stay awake long enough to help you with something. So, what can I do? » Le regard qui se posent sur ce qu’il a étalé. Et puis il n’y a qu’en s’entraînant qu’elle pourra s’améliorer — et même si cuisiner ne sera sans doute jamais sa grande passion, elle veut bien s’y mettre un peu, au moins pour partager ces quelques minutes avec Rom.

Son air satisfait tangue légèrement, il secoue la tête et rapproche d'un bras le corps d'Ava du sien. « Don't say that. » Il n'est qu'à moitié dérangé par ces suggestions, mais, à choisir, il préfère ne pas s'aventurer sur le sujet. C'est pourtant bel et bien ce qui lui est passé par l'esprit en l'absence de réponse, le pire, mais seulement momentanément, et elle est là, elle va bien, et il est hors de question de laisser la soirée prendre une autre tournure. Il pourrait le lui dire maintenant, mais les mots paraîtraient légèrement forcés, et il se tait une fois de plus. « Yeah, it's a lot up there, you don't wanna know », qu'il contre alors, levant les yeux au ciel et remettant une énième fois la déclaration à plus tard. Pas trop tard, ce n'est jamais loin de lui échapper. Ils en sont rapidement à parler vacances, un mot qui leur est pratiquement inconnu à tous les deux, mais qu'il est loin de rejeter s'il est question d'être ensemble, et de faire en sorte que leur job n'empiète pas. Il est prêt à l'introduire dans son vocabulaire, Román, au risque de s'attirer les foudres de sa soeur, à laquelle il n'avait toujours pas cédé. « Are you gonna make us a very strict itinerary if we go sightseeing ? » Il a un sourire amusé, à peu près sûr que leurs styles de tourisme divergent assez, lui plutôt du genre à ne pas planifier et se balader au feeling. Il peut voir qu'elle pense déjà à l'organisation que demanderait le fait de quitter tous les deux le bureau, se demande combien de temps leur prendra le simple fait de se décider à sauter le pas. « Weeell... » Maintenant qu'il est lancé sur cette histoire de date au milieu duquel il s'est endormi, il n'est pas certain de sous quel jour le récit le peint. « I was tired, for my defense, it was late and I'd eaten a lot, and she was telling me a story I'd already heard twice 'cause she's a friend of my brother's (who's got like five stories, tops). He wasn't happy with me dating her, by the way, so I kinda did us all a favor there. » Il sourit face à la menace envers son canapé, plus encore à celle de l'envoyer manger ailleurs quand ils savent tous les deux que ses options sont plutôt limitées, ici. « You can't throw me out, I don't see anyone else offering free dinner right now», avance-t-il, et puisqu'elle ne le pousse pas vers la sortie, il se met à la recherche d'ingrédients dans les placards et le réfrigérateur. Un peu inquiet à l'idée de ne pas trouver d'épices, il en découvre tout de même des pots oubliés pendant qu'Ava disparaît dans sa chambre. « Right, you can chop those and put them in the pan, I'll try to find some oil to cook them in », qu'il propose, amusé par le côté débrouille de l'art culinaire quand il est chez elle. Il lui tend la poêle en question après avoir désigné les légumes abandonnés sur la planche à découper, et lèves les yeux pour découvrir qu'elle s'est changée. « You're beautiful. » Il sourit, avant de mettre l'eau à bouillir pour les pâtes et de, comme prévu, chercher une bouteille d'huile, attrapant finalement un couteau supplémentaire pour prêter main forte à Avalon et potentiellement manger rapidement. « So, what did you do before you forgot about me and fell asleep ? »

Doit-elle lire quelque chose dans la façon qu'il a de brush off le sujet ? Une non envie d'imaginer le pire ou bien la possibilité qu'il soit tout autant plein de doute quant à leur relation qu'elle ne l'est, elle-même ? Elle se demande, Ava, ce qu'elle aurait pu penser à sa place s'il avait été en retard à leur rendez-vous et elle n'a pas besoin de creuser loin pour savoir que toutes sortes de scénarii lui auraient traversé l'esprit. Du plus meurtrissant au plus douloureux, du plus probable au plus loufoque. Sans doute que rien ne lui aurait échappé et peut-être bien que Rom n'est pas si différent qu'elle, finalement. Peut-être partagent-ils cette inquiétude de se perdre l'un l'autre mais est-ce chez lui la même angoisse que ça l'est pour elle ? Elle ne peut pas l'interroger, consciente que ça ne servirait à rien si ce n'est peut-être créé un conflit là où il n'y a pas lieu d'y en avoir. C'est qu'ils sont là, tous les deux, à s'échanger ce genre de regards qu'elle a l'habitude de voir à la télévision, dans ses téléfilms romantiques qui la font autant rêver qu'ils l'exaspèrent (sans doute parce que, justement, ils la laissaient envieuse et rêveuse malgré ses grands airs) et, pour l'instant, ça lui suffit. C'est tout ce dont elle a besoin. Elle n'a même pas besoin qu'il se déclare davantage et si elle est (une nouvelle fois) tentée de le pousser pour la taquinerie, elle n'en fait rien, saura attendre que ça leur vienne plus naturellement, plus simplement. Elle a, de toute façon, déjà l'esprit occupé à réfléchir aux prochaines (premières) vacances qu'ils pourraient prendre, partager et il doit voir son cerveau s'actionner à ce qu'il lui dit et pour laquelle elle fait mine de prendre la mouche pendant un dixième de seconde. « Don't worry, I'll let you have five minutes for yourself if you need it. » Elle joue le jeu, Ava, bien qu'elle ait surtout l'intention de dresser une liste de musées et monuments qu'elle aura le devoir de visiter et de préparer un itinéraire de sorte à ne pas faire des allers-retours trop inutiles (autant gagner du temps pour pouvoir en visiter un maximum).
Elle glousse à l'anecdote, se note de ne jamais radoter les mêmes histoires au risque de l'ennuyer au point de l'endormir. Elle se mord l'intérieur de la joue, le regard pourtant adoucit malgré les paroles qui lui échappent. « I'm not above paying to eat, you know. » Haussement d'épaule et la tête qui se tourne, ce besoin d'avoir le dernier mot peu importe la situation, cette habitude qu'elle voudrait perdre tant elle lui cause des problèmes par moment. Elle s'absente rapidement, revient non sans se sentir un peu plus réveillée et fraîche et, étrangement, enthousiaste par la tournure des événements malgré le côté imprévisible. Les joues rosissent au compliment, la tête se baisse sous le même effet et elle attrape un couteau pour se mettre à l'oeuvre. « You clean yourself nicely too. » Et peut-être qu'elle devrait prendre des cours en matière de compliments tant celui-ci lui parait maladroit et à côté de ce qu'elle voudrait exprimer. « Many calls at the office and a few appointments that turned out to be mostly waste of time. And I was trying to find an outfit for tonight. » D'où la multitude de vêtements pour l'accompagner dans sa sieste impromptue. « How was your day? » Les légumes jetés dans la poêle avant qu'une main n'aille glisse le long du dos de Rom tendrement, patientant pour les prochaines instructions de cuisine. Elle se rend compte, à mesure qu'ils font un peu la conversation et que la soirée avance et si c'est un date comme les autres, c'est surtout un date comme elle les aime.

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rp terminé