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 wallan #1 // in my cold arms

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Aladdin

Aladdin

- this is mePRESENT(E) DEPUIS : 19/07/2017 MESSAGES : 511 CREDITS : av/olympia.
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MessageSujet: wallan #1 // in my cold arms   wallan #1 // in my cold arms EmptyJeu 18 Jan - 14:38

✩ ✩ ✩ ✩ ✩
and i know what's on your mind, god knows i put it there but if i took it back, well, you'd be nowhere, you'd be nowhere again. now look at you all torn up, i left you waiting to bleed, i guess the truth works two ways, maybe the truth's not what we need(c) mumford & sons (in my cold arms)

La lettre rejoint les précédents sur la table. Cachet de la banque bien visible, tête de pile, ligne rouge comme un rappel menaçant. Voile sombre et triste qui couvre son regard, se propage jusqu’à son coeur pour l’envelopper. Le choix, il ne l’a plus. Il y a tout qui se serre juste à l’idée, les doigts qui se font tremblant, les paumes moites, la gorge sèche. Plus le choix. C’est pas ce qu’il aurait voulu ; pas la façon dont les choses étaient supposées se terminer — l’exact opposé. Les paupières se ferment une seconde, celle nécessaire pour souffler et inspirer et se redresser. Il hésite à l’appeler, Gigi, à amorcer la conversation d’un texto mais le courage est absent et il affaisse les épaules.
Depuis quand n’ose-t-il plus la contacter ?
Il vérifie l’heure, encore un peu tôt, elle est à l’hôpital. Le planning encore en tête, à moins qu’elle ne l’ait fait changé, à moins qu’elle n’enchaîne toujours plus de permanence. Il attendra, Wassim. Gigi, il l’attendra toujours. Les heures qui le sépare de la fin du shift serviront à comment amener le sujet sans braquer, comment parler de la vente sans évoquer Ismail — à trouver la force d’y retourner sans s’effondrer tout à fait, aussi.
Ses doigts caressent la surface du violon en cours, la tête rejetée en arrière. Une respiration. Deux respirations. Le visage d’Ismail, rayonnant après avoir réussi un jeu, ce sourire si grand qu’il semblait prendre toute la surface de sa tête, deux petites dents trop visibles, une fossette pour venir creuser l’enfant en lui, les yeux brillants d’une joie qu’il était encore incapable d’exprimer par des mots juste ce petit son, entre le cri ravi et le rire amusé. Coup au coeur. Le monde qui se fige et résonne à ses oreilles. L’image qui se brouille pour être remplacée par la seule qu’il voudrait pouvoir oublier de son fils — Ismail dans ce lit trop grand pour lui, les draps bleus et blancs, les tuyaux qui lui masquent le visage et les appareils, le bruit strident d’une ligne plate. Deuxième coup au coeur. La respiration soufflée, l’air manquant. Le bourdonnement plus présent et le coeur qui pète, dans sa poitrine, qui hurle de désespoir et de cette douleur qui ne disparaît pas. Qui ne semble pas pouvoir disparaître. Le coup au coeur supplémentaire, qui lui donnerait envie d’échanger sa place, de réécrire l’histoire. Se perdre lui, oui, mais Ismail — surtout pas Ismail.
Il s’arrache aux souvenirs qui percent l’âme, referme l’atelier avant d’en faire un lieu hanté, lui aussi. A peine un tour dans le magasin, à peine un mot aux employés ou clients présents — taciturne depuis de longs mois, les mots qui lui manquent à répétition, qui se font rares, qui se coincent quelque part, inaccessibles, fuyants. Il traverse la ville à pied, le crachin de fin octobre humidifiant le blouson et les cheveux sans qu’il ne s’en inquiète. Trop occupé à craindre les prochaines heures.
La maison est éteinte, la voiture de Gigi absente de l’allée. Resté au portail, le corps tétanisé, l’esprit envahi de souvenirs. Il y a tout. La course après le ballon avec Ismail, son rire, la course de la voiture à la porte les jours de pluie, la première tentative de vélo à petites roues, l’odeur des plats qui se préparent dans la cuisine, celle de la terre mouillée, le parfum des fleurs dans le petit jardin, la sensation du soleil sur son visage, d’Ismail niché sous son bras, les pages du livre de Gigi. Il y a tout. Sans qu’il n’y ait rien. Malgré lui, il cherche, Wassim. Les indices que ces longs mois glacés n’auraient été qu’un cauchemar.
Vingt minutes sont passées et enfin, il parvient à repousser le portail, à traverser l’allée et à s’installer sur le porche de la maison. Tête baisse, tête dans les mains. Ne pas voir pour ne plus se remémorer de quoique ce soit. Essayer de berner l’esprit, le cerveau, l’abrutir d’un néant qui est préférable à la douleur lancinante et continue. Encore quelques minutes — une éternité, et un moteur retentit. Il presse les paupières avant de relever la tête. Gigi. Son ombre.
Son fantôme.
Peut-être donne-t-elle l’illusion au reste du monde — pas à lui. Il voit les cernes, il voit le teint, il voit l’absence de joie ou de sourire sur son visage. Il voit son reflet quand il la regarde, le reflet de ce qu’il ressent. Il se relève lentement. « Hey, » qu’il souffle tout bas. Le bras qui voudrait se soulever, se tendre jusqu’à lui attraper la main pour serrer ses doigts, embrasser sa tempe. Il reste immobile. « We — we need to talk. » L’estomac qui bondit et le coeur qui se ramollit. Il veut pas parler, Wassim, pas de ça. Il veut pas concrétiser la séparation, la fin d’eux. Pas plus qu’il veut rentrer dans la maison, y voir tout ce qui aura été changé, déplacé, remplacé. « I’m sorry, I should have texted you, I just — I just wasn’t sure you’d answer. » L’aveu qui lui déchire quelque chose à l’intérieur, les mots plus tranchants que le reste. Lui font-ils mal, à elle aussi ?
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Aladdin

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MessageSujet: Re: wallan #1 // in my cold arms   wallan #1 // in my cold arms EmptyJeu 18 Jan - 14:40

La pénombre au dessus de sa tête témoigne de la soirée entamée, elle traverse le parking d'un pas pressé sans, pourtant, nulle part où aller. Home, to the cats, a-t-elle lancé à une collègue, l'air ravie de cette conclusion à une journée relativement calme. Si elle ne se lasse pas des chats, elle ne se fait toujours pas au silence. Pas de jeux, imitations de trains à vapeur ou collisions de blocs de constructions sur le tapis. Pas de commentaires devant un programme télévisé que Wassim n'approuverait pas, ni de rires face à la façon dont Ismail aurait, immanquablement, fait atterrir la moitié de son assiette à côté. Rien qu'elle, ses foutues pensées, le vide, le vide, le vide. Les lambeaux de vie, trois vies. Tout souvenir et aucune vitalité. Peut-être est-ce comme cela que se créent les fantômes, que les lieux se font hantés. Malgré son existence, à elle, sa persistance, le coeur n'est plus et cela suffit à laisser s'installer le mythe. Bientôt, on passera devant la maison en pressant le pas. Bientôt, les enfants se mettront au défi d'approcher avant de fuir à toutes jambes au moindre mouvement derrière les rideaux tirés.
Ce soir, ses pensées n'ont pas plus de sens, ni d'ordre, que les autres. Elles dérivent, en dépit de tous ses efforts pour se concentrer sur les évènements de la journée, ce qu'elle a fait, ce qu'elle aurait pu faire, quels dossiers il lui faudra suivre. Inévitablement, Ismail fait son apparition. Entre la fracture du matin et la consultation du soir, le visage de son fils. Entre l'arthrite et l'urgence de midi. Entre chaque clignement de paupières, si elle est honnête. Et ses grands yeux, ses boucles, ses expressions déjà si caractéristiques, tout ne peut que la renvoyer à Wassim. Elle ne savait pas, Gigi, que perdre l'un signifiait les perdre tous les deux. Elle ne savait pas qu'elle perdrait qui que ce soit, mais moins encore Wassim, et leur aimantation. Ils n'ont jamais eu à le dire, elle n'en a jamais douté, pas même la première fois, la séparation n'était tout bonnement pas envisageable, insoutenable, jamais durable. Cette fois, ses plans sont disséminés au vent, enterrés, broyés. Sans issue, sans foi ni illusion, sans promesse bien qu'ils s'en soient tant faites.

Ses phares le découvrent avant elle. Voûté sur l'ultime marche du porche, elle pourrait presque ne pas reconnaître sa forme, mais un pincement au coeur suffit à la réalisation. Elle est presque tentée de faire demi-tour, avant qu'il ne relève les yeux, avant qu'il ne soit trop tard. Tout autant qu'elle est tentée de s'extirper de la voiture au pas de course afin de ne plus être séparée de lui une seule seconde. La mesure prend le dessus, elle ne sait par quel enchantement, et elle pénètre dans l'allée, se gare, récupère ses affaires sur la banquette arrière. Elle étudie jusqu'à son pas, ni trop rapide, ni trop réticent. Son regard sur elle tel un spot révélateur. L'impression d'être exposée, dans toute sa faiblesse, son mensonge, son déni. Que ne donnerait-elle pas pour faire disparaître le nœud au fond de son estomac, sensation si improbable, il y a encore quelques mois, tant que Wassim était à proximité.
Et lui. Si elle pouvait effacer cet air. Celui qu'elle ne connaît que trop, qu'elle évite chaque matin dans la glace. Pourtant, si elle savait qu'un baiser pourrait l'effacer, elle n'est pas certaine qu'elle parviendrait à le lui donner. Sa voix la fait frissonner, elle espère que la lumière seule de la lune ne suffit pas à le laisser percevoir. « Hey. » Elle voudrait lui dire qu'elle ne l'attendait pas. Plus, qu'il ne devrait pas être là. Qu'elle n'est pas prête, mais prête à quoi ? Le coeur s'est affolé si tôt qu'elle l'a aperçu, quelle nouvelle déchirante amène-t-il, quel nouvel abattement ? Le coeur lui descend jusque dans les entrailles une fois qu'il reprend. Elle ne dit rien, le regard sans doute hagard, les doigts commençant à jouer avec son trousseau de clés tandis qu'elle remonte la sangle de son sac sur son épaule. Parler, ils ne savent plus le faire, ne l'ont-il pas prouvé ? N'est-ce pas la raison pour laquelle ils se tiennent ainsi, dehors, après des semaines d'absence ? Elle n'a rien à dire, sa langue se fait pâteuse, lourde, traîtresse qui ne la laisserait même pas demander de quoi. Elles attendent, elle et sa langue, qu'il reprenne. Coup fatal ? Pas encore, comme quoi, elle peut encaisser beaucoup. Trop, sûrement. Un semblant de contenance lui revient, sa voix aussi. Elle regarde ailleurs, cela dit. « It's fine, you're... It's your house. » Home, a-t-elle failli articuler. Mais elle pèse ses mots, désormais, Gigi, même auprès de lui. Home, il serait alors entré, n'aurait pas eu à patienter. Home, elle ne se serait pas trouvée si surprise de le voir. Il serait là tous les soirs.
Elle évite également la question de savoir si elle aurait répondu à un texto, la réponse ne plairait sans doute à aucun d'eux. I'm not sure either. Tout aurait probablement dépendu du contenu. Devrait-elle être en colère de se trouver ainsi piégée ? Elle ne ressent qu'un mélange de soulagement et d'angoisse. Parce qu'il est là, entier bien que déchiré. Parce qu'elle n'a aucune idée de quoi faire de cette information, mais que quelque chose en elle ne peut s'empêcher de palpiter. « You, ehm, did you wanna come inside ? » Elle sait la difficulté d'y faire face. Elle doute de sa propre capacité à passer plus longtemps à s'échanger des airs penauds. Elle ne sait si elle préférerait ou non un refus. « I don't have much in the fridge but I could whip up some tea, you look shivery », qu'elle comble, ou explique, comme si l'inviter chez elle, chez eux, nécessitait une raison, une logique.
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MessageSujet: Re: wallan #1 // in my cold arms   wallan #1 // in my cold arms EmptyJeu 18 Jan - 14:42

It’s your house.
Les mots simples, dérisoires, le heurtent. plus que de raison. L’est-ce encore ? Il sait, Wassim, qu’il devrait secouer la tête, lui rappeler que ce n’est plus chez lui, qu’il en est parti, incapable de vivre avec les souvenirs sous les yeux quotidiennement, incapable de tenir debout dans les couloirs où les cris, les rires et les mots d’Ismail ont retenti. Qu’il en est parti parce que ça faisait trop mal, le matin au réveil, le soir au coucher et tout au long de la journée, de sentir la présence et l’absence à la fois, de le voir sans qu’il ne soit là. Les images intangibles ont été les pires, le spectre d’une tête brune qui court et cavale et joue comme trop pesant, prêt à le rendre fou, Wassim. Fou d’avoir perdu la seule autre personne qu’il ait adoré et aimé si fort qu’il aurait préféré ne jamais avoir à les perdre. Fou de ne plus savoir comment s’adresser à elle quand ça lui a toujours été si simple, si évident. Il devrait lui préciser que ce n’est plus comme avant, qu’elle devrait bien le savoir, elle qui reste dans ces murs hantés de souvenirs, que ce n’est plus sa maison.
Mais ça l’est.
C’est une autre porte qu’il pousse tous les soirs, d’autres pièces et, pour la majorité, d’autres meubles, mais son coeur n’y loge pas. L’appartement n’est pas la maison, n’est pas un chez lui qu’il se serait fait juste un abri où dormir et faire semblant de survivre quand l’esprit semble avoir déjà abandonné. Home is with her. The house too. Le regard passe des yeux de Gigi à son nez, puis ses lèvres avant de terminer sur l’allée. Il n’aura plus d’autre maison, de lieux où se sentir bien et accueilli et n’est-ce pas là un retour aux sources, finalement ? Voué à rester seul — peut-être bien que c’est lui qui a amené le désastre, alors. Issu d’un foyer brisé, il ne pouvait qu’en créer un autre. Les mots sont sur sa langue. It’s not my house anymore, Gi. Mais c’est la voix qui lui manque, ou peut-être est-elle absorbée par sa lâcheté et il ne dit rien.
Se glace, même, à l’idée d’entrer. Ne peuvent-ils pas avoir la discussion dans le jardin ? Il ne fait ni assez beau, ni assez chaud ni assez jour. Caprice de parent détruit, d’être égoïste qui ne veut pas avoir à affronter quoique ce soit et peut-être qu’il devrait s’excuser et partir. Le rappel du message de la banque l’oblige à ne pas broncher. Il tourne la tête comme s’il découvrait la maison derrière lui. Il est déjà si proche. « It’s probably best if we don’t have this conversation outside. » Ce n’est pas qu’il veut entrer, c’est une question de logistique — si elle interroge davantage, il prétendra ne pas vouloir lui faire attraper froid quand c’est un peu de honte déguisée, en réalité. Wassim, il ne veut pas que d’autres puissent connaître l’instabilité financière dans laquelle il se trouve, l’épée de Damoclès qui balance au-dessus de sa tête. Il s’efface d’un pas pour la laisser ouvrir, le coeur comme à l’arrêt et le ventre noué d’une angoisse étrange. Ses doigts tremblent légèrement et il les force à l’immobilité avant de faire un pas en avant. Extérieur, intérieur. Les yeux se ferment d’eux-mêmes comme pour ne pas voir tout ce qui aurait changé, tout ce qui serait resté à l’identique. « A tea would be nice, yeah. Thanks. » Les yeux dévoilés sous ses paupières et il y a un coup physique qui lui coupe le souffle. C’est bien la maison. Les murs, les meubles, ne manquent que ses affaires semble-t-il. Et celles d’Ismail. Il cherche son manteau du regard, un jouet qui aurait été oublié. Et s’il s’avance, Wassim, ce n’est pas pour prendre la direction de la cuisine ou du séjour, c’est pour s’aventurer dans le couloir qui mène à la chambre. Les pas stoppés avant de faire face à la porte, avant même de savoir si la porte est ouverte ou fermée et il exhale un souffle tremblant. « Just… Go ahead, I’ll be — I’ll be there in a sec. » Il grimace un sourire qui se voudrait rassurant, la tête à peine tournée en direction de Gigi et il attend de la savoir partie pour relâcher la tension de ses épaules, un autre souffle plus erratique et c’est finalement dans la salle de bain qu’il s’enferme. Le sang cogne contre ses tempes, ses mains sont fébriles et ses jambes cessent de le porter alors il se rattrape au lavabo, le sanglot logé dans la gorge. L’air coince et il tremble, tremble sans s’arrêter, tremble sans se contrôler. Ismail dans la tête, Ismail dans le coeur — Ismail, partout.
L’esprit concentré sur sa respiration dont il retrouve la maîtrise petit à petit, il attend que les battements de son coeur se fassent moins effréné pour rouvrir la porte et, le pas un peu plus assuré, rejoindre Gigi. « Sorry. » La voix étranglée et il tire une chaise à lui, ne s’assoit pas pour autant. « We need to sell the house. I don’t want to pressure you or anything but… » Mais s’ils ne le font pas, son magasin fermera contre son gré. Mais il ne comprend pas son attachement pour un lieu qui rappelle le mauvais autant que le bon, un lieu où le bon fait encore plus mal que le mauvais. « But I… I could use the money. » L’honnêteté, parce qu’il ne lui a jamais rien caché, à Gillian. Pourquoi commencerait-il maintenant ?
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MessageSujet: Re: wallan #1 // in my cold arms   wallan #1 // in my cold arms EmptyJeu 18 Jan - 14:43

Elle est reconnaissante du répit que représente son silence, à lui aussi. Non seulement parce qu'il lui permet de reprendre ses esprits et de réfléchir, mais parce que l'absence de réponse n'est pas tout à fait une contradiction et qu'elle n'est pas prête à l'entendre dire que non, ce n'est pas sa maison. Ils pourraient sans doute débattre du sens du terme des heures durant, mais ce n'est pas pour cette raison qu'il est là, n'est-ce pas ? Ne pas savoir l'alarme, elle fait bonne figure. Ce n'est rien de bon, ce ne peut être rien de bon, elle a le coeur au bord des lèvres alors que les éventualités défilent sous son crâne. Ses mots lui font comme un coup de grâce, what conversation ? C'est cryptique, douloureux à l'avance.
Elle ne se souvient que trop bien des dernières conversations qu'il valait mieux cacher dans l'intimité de leurs logements successifs. Et peut-être n'est-ce dû qu'à la météo, l'heure qui tourne, le froid, mais elle ne parvient pas à s'en convaincre. Alors elle pense, comme par flashs, à Ismail, et puis à elle-même, il y a vingt ans. Celui dont elle n'a pas voulu, dont ils n'ont pas voulu, et qui semble aujourd'hui la source de tous leurs problèmes.
Les apparences, pourtant, tiennent bon, si ce n'est la force avec laquelle elle serre ses clés dans son poing, de quoi laisser des dentelures au creux de sa paume. Elle le frôle presque en le dépassant pour ouvrir la porte. Son parfum lui parvient et, immédiatement, une boule se forme dans sa gorge. Elle garde les yeux rivés sur la porte, malgré la tentative avortée d'un sourire poli. Elle ne veut pas témoigner de sa réaction, à la vue de ce chez-eux inchangé et pourtant si vidé de son essence. Elle n'a pas besoin de plus de détresse, plus de peine, de croiser ce regard qu'elle n'a aucun mal à imaginer plus que meurtri. Elle craint le jugement, également, d'avoir peut-être déplacé quelque chose qu'elle n'aurait pas dû malgré tout le soin qu'elle prend à conserver leurs affaires, ou, au contraire, qu'il se dise qu'elle a perdu la tête et aurait dû tout faire disparaître plutôt que de vivre dans un musée au souvenir de leur fils. Leur fils, et lui, Wassim qui n'a pas disparu des murs, dont certaines des affaires les moins personnelles sont encore à leurs places. Bien sûr, elle a fait du rangement, ou peut-être était ce lui, en partant, rassemblant ses affaires, sa vie, avant de passer la porte. Bien sûr, les jeux d'Ismail ne sont plus éparpillés dans les pièces comme s'il allait s'en saisir à tout moment, elle n'est pas à ce point délirante, mais il y a bien un bac de jouets toujours à sa place sous la télévision, des dessins sur le frigo. Il y a cette chambre qu'elle n'a aucune intention de modifier. Ces touches qui font qu'elle n'est pas si seule, parce qu'une part d'eux est toujours là. Tout cela la fait s'arrêter, pensive, avant d'avoir atteint la cuisine. Ce ne sont pas des choses auxquelles elle pense souvent, l'habitude a lentement pris le dessus, mais, s'il faut y penser, elle est capable de lister tout ce qu'elle garde sous la main, sous les yeux, à portée comme pour ne rien oublier. Elle ne réalise pas immédiatement que Wassim ne la suit pas, trop occupée à éviter de le regarder, éviter de voir s'il traîne, s'il n'ose pas, ne peut pas. C'est sa voix qui l'annonce, et elle ne se retourne pas.
Tout son corps voudrait le suivre. Tout son être n'est que volonté de l'apaiser, lui montrer qu'elle comprend, qu'elle est toujours là, sera toujours là. Son coeur tambourine et elle voit les larmes s'agglutiner au ras de ses cils. Fuck. Même pas dix minutes au même endroit, et les voilà.
C'est Wassim, juste Wassim. Elle peut lui faire face, plus, elle peut lui parler, elle a toujours pu lui parler.
Elle bat des cils pour dégager sa vue et s'attelle à la préparation du thé, le coeur qui se serre et se tire pour l'empêcher d'oublier qu'il est là, qu'il est dans un état qu'elle fera mine de ne pas remarquer. Qu'il revient, elle l'entend et prend quelques secondes avant de se retourner, deux tasses à la main. Elle est sommairement protégée par la distance imposée par l'îlot central de la cuisine, derrière lequel elle se tient, tandis qu'il tire une chaise. « No worries. » Elle répond tout de suite, peut-être tant qu'elle sait parler, contrôler sa voix. Les nerfs la rongent, elle a hâte qu'il parle, elle redoute qu'il parle. Lorsqu'il le fait, elle est moins soulagée qu'elle ne l'avait espéré. La maison, la foutue maison, tout y revient ce soir. Le fait est qu'elle était d'accord, de la vendre, alors sans doute cela ne devrait il pas être une telle surprise. Mais elle était d'accord il y a plusieurs longues semaines et, apparemment, les choses ont changé. « Here's your tea », offre-t-elle avant toute chose. Comme si elle n'avait rien entendu. Comme s'il ne venait pas de lui dire qu'il a besoin d'argent et que la solution serait de vendre leur maison. Leurs souvenirs. La dernière chose qu'ils aient en commun, outre les blessures. Son regard le détaille moins d'une seconde puis se baisse, abattu. Elle ne l'aurait pas cru, mais c'est une déchirure. Peut-être plus parce qu'il n'est là que pour ça. Pas pour elle, pas pour eux, pas même pour Ismail, bien qu'il n'y ait rien de plus à dire sur ces sujets. Bien qu'elle n'ait jamais, jusqu'ici, voulu en dire plus. Mais il est là pour vendre la maison, par nécessité, autrement il n'aurait jamais mis les pieds ici, autrement ils ne seraient pas là, autrement peut-être se seraient ils arrangés pour ne plus jamais se revoir. Elle sait qu'elle va trop loin, que son esprit détourne la situation, que, de toutes manières, elle l'a déjà perdu. Cette conscience n'empêche pas ses yeux de s'embuer.
Elle ne sait pas combien de minutes passent avant qu'elle ne paraisse se réveiller, et daigne répondre. « I'm sorry, it's just not what I expected. » Pas qu'elle ait su à quoi s'attendre du tout. « Uh, maybe... Maybe I could uh, buy your half ? I know you won't take money from me but that would just be like if anybody bought the house and we split the money, right ? » Elle en revient aux faits, concrets, malgré sa voix qui trahi une certaine déconfiture. Elle devrait lui demander si ça va, s'il a besoin d'aide, pourquoi ce besoin urgent, ce qu'elle peut faire. Elle ne le peut plus, n'est-ce pas ?
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